MA METHODE POUR L’ANIMATION D’UN DEBAT
Six paramètres sont à considérer dans l’animation d’un débat : l’organisateur, le thème, les protagonistes, le lieu, le public et l’actualité.
Six paramètres sont à considérer dans l’animation d’un débat : l’organisateur, le thème, les protagonistes, le lieu, le public et l’actualité.
Initiateur du débat il est évidemment celui avec lequel le travail débute. Il sera précisé avec lui les conditions physiques (date, lieu, durée, moyens techniques à disposition ) de l’intervention. Très important : bien saisir au cours des discussions l’intention de l’organisateur et la direction qu’il souhaite donner aux échanges. Cette démarche doit répondre à cette question : « Pourquoi organise-t-il un débat? ». Ceci est tout aussi important que la bonne connaissance du thème. Il en va de la façon dont le débat sera mené.
Lors de ma collaboration avec les services du Conseil Général 04 pour la mise en place de l’animation d’un débat sur les travaux du syndicat mixte « Villages et cités de caractère », la volonté de l’élu Jean-Louis Adrian en charge de l’initiative était au vue de l’assistance conviée (maires, artisans, architectes, habitants…) de ne surtout pas orienter la réunion sur des propos trop techniques. L’idée forte était de donner à comprendre que les travaux engagés par ce programme avaient une incidence directe dans le quotidien d’une commune adhérente et améliorer grandement le cadre de vie. Nous avons alors rédigé des questions simples. J’ai accentué mes sollicitations pour des commentaires ou des interrogations envers la salle. Je suis resté très vigilant à ce que les propos des invités soient compréhensibles par le plus grand nombre n’hésitant pas à demander des explications sur des termes techniques ou des abréviations en constatant que dans la salle certains ne comprenaient pas.
Sur une autre organisation, celle-ci avec la chambre de commerce et d’industrie territoriale du 04, portant sur les relations des chefs d’entreprises avec les organismes bancaires, il m’avait été demandé de forcer le ton avec les professionnels de la banque de façon à ce que la fonction soit « désacralisée ». Ma posture devait permettre aux entrepreneurs de se sentir pleinement à l’aise afin qu’ils osent poser des questions un peu dérangeantes à l’égard de la profession : montant des agios, prise de risque, soutien, confiance, évaluation de la réussite d’un projet d’entreprise. Cela a fonctionné tout en restant dans le cadre du respect et de la politesse : des principes de courtoisie que je me faisais fort aussi de rappeler.
Cela peut apparaître comme un poncif mais les évidences sont parfois bonnes à rappeler : pour une animation de débat le sujet doit être travaillé. Cependant la maîtrise des problématiques, des enjeux et la compréhension des perspectives ne s’acquierent pas seulement par l’accumulation de notes, de documentations tirées de recherches ou de témoignages. Si cette étape est nécessaire elle est loin d’être suffisante. Cette enquête doit avoir un sens. Je me suis toujours discipliné à adopter autant faire se peut l’attitude qui consiste à, pour un sujet simple, commun à beaucoup, le rendre compliqué et inversement. Ce n’est qu’à ce titre qu’on l’envisage pleinement et qu’on le rend intéressant. Un thème d’emblée difficile, un sujet de spécialistes, aura plus d’intérêt si on parvient à faire apparaître combien il nous concerne tous au quotidien. A contrario une question d’apparence facile gagnera en pertinence si on réussit à démontrer qu’elle est bien plus complexe qu’on l’envisageait.
En février 2019, dans quelques communes des Alpes de Haute Provence, on me charge de préparer et d’animer des réunions publiques, contributions au Grand Débat National lancé par le Président de la République. Dans les thèmes à débattre se pose là celui de la fiscalité. Un sujet que tout un chacun semble pouvoir aisément s’approprier. On a tous son mot à dire sur les impôts. Justement mon défi d’animateur du débat était là : face à des doléances partagées par une grande partie de la salle et donc à une opinion générale pouvant se résumer à « l’impôt est injuste et on en paye trop » mon rôle a été de faire entrevoir à chacun les multiples facettes de la question. Impôts locaux, impôts sur le revenus, taxe sur la valeur ajoutée, progressif ou proportionnel, ainsi présenté le sujet a suscité des échanges plus intéressants et des opinions bien plus marquées que ce que le simple énoncé du thème pouvait le laisser entendre.
Celles et ceux qui seront emmenés à prendre la parole lors de l’animation du débat sont nécessairement contactés (téléphone, Skype, Zoom voir idéalement de visu) à l’avance afin de se présenter à eux d’abord et ensuite de connaître le plus précisément possible les relations qu’ils entretiennent avec le thème traité. Cela comprend leur rôle, leur fonction, leur parcours mais aussi leur opinion par rapport aux différentes questions soulevées par le sujet. Dans cette étape d’approche des invités une interrogation ne me quitte jamais : « De quelle façon chacun d’entre eux va-t-il pouvoir servir la direction que l’organisateur me demande de donner au débat ? ». Ainsi si il est assez aisé d’établir le déroulé par lequel les uns vont pouvoir, par rapport au sens souhaité, s’articuler avec les autres en identifiant les pour, les contre, les modérés, les neutres, plus laborieuse est la démarche qui consiste à bien cerner les traits de caractère des personnes appelées à parler. C’est pourtant indispensable. Lors de cette phase de « reconnaissance » une bonne écoute et une bonne observation doivent permettre à l’animateur de recenser les bons communicants et les moins bons. Ceci va avoir une importance capitale lors de la tenue du débat dans le rythme des échanges et dans la répartition des temps de parole. Certains protagonistes devront être « contrôlés », d’autres seront appelés à être aidés par l’animateur.
Lors de l’installation effective du projet ITER en Provence, je suis recruté pour être l’animateur de plusieurs émissions TV/radio et d’un certain nombre de débats ayant pour objectif d’expliquer à la population le bien fondé de cette initiative scientifique unique. On organise une série de réunions publiques. L’une d’entre elles se tient à Vinon sur Verdon. Thème de l’échange : ITER, le soleil en bouteille. Direction souhaitée par l’organisateur : faire comprendre au public que si le principe de la fusion est simple, sa mise en place dans un processus d’industrialisation est elle très compliquée. Intervenants : quelques élus, Neil Calder Directeur de la communication d’ITER et Akko Maas un physicien spécialiste du principe de fusion. Dans mon travail d’approche des invités je m’aperçois que ce dernier est assez mal à l’aise dans ses explications, c’est pourtant la caution scientifique du débat, alors que Neil est d ‘une facilité déconcertante proche de la performance d’acteur. Fort de cette constatation, j’ai volontairement durant la conférence déséquilibré les temps de prise de parole. Lorsque Akko devait répondre je me suis systématiquement rapproché de lui afin qu’il s’adresse, en me regardant, directement à moi. Cela lui a évité de considérer l’assistance et avec ça le stress qu’elle pouvait lui procurer. Cela a fonctionné. Les deux m’ont remercié. L’un pour l’avoir aidé, l’autre pour avoir réussi à garder le cap qu’il m’avait donné.
Un repérage préalable de l’espace dans lequel l’animation du débat se tiendra s’impose. L’animateur doit s’imprégner de son futur lieu de travail. Cette visite doit s’effectuer en présence de l’organisateur. Si celui-ci a des impératifs concernant la disposition des éléments du décor, du mobilier, l’installation des invités et l’emplacement du public, le chef d’orchestre du moment qu’est l’animateur doit lui aussi trouver sa bonne place. Les différents endroits où il pourra se tenir et le cheminement qu’il pourra emprunter ont des conséquences sur la manière d’animer : dynamique, statique, ou une alternance des deux. On discute alors. On échange afin d’établir des compromis. C’est à ce moment là aussi qu’on aborde le volet technique. On recense les moyens mis à disposition et on détermine leur utilisation. On relève les manques. Idéalement dans cette prise de connaissance du dispositif son/éclairage le préposé à la technique est là. Cela permet d’effectuer les présentations et d’amorcer la constitution du binôme technicien/animateur au sein duquel une bonne entente est toujours un gage de réussite.
2003 le Ministre Luc Ferry lance un débat national sur l’avenir de l’école. Cela promet au vue des tensions syndicales qui secouent alors l’Education Nationale. J’ai bien ça en tête. La Préfecture du 04 fait appel à mes services pour animer ces rassemblements en Haute Provence. Ville choisie Forcalquier et sa salle des fêtes. Repérage des lieux : l’espace est tout en longueur avec au fond une scène et les moyens techniques sont rudimentaires. Si l’on reste dans cette configuration on va accentuer l’opposition entre nos invités de l’académie et du rectorat disposés sur l’estrade et les représentants syndicaux parmi le public. De plus on ne dispose pas de micro sans fil : les questions émanant de salle devront se faire a capella. Jeu de billard à trois bandes entre l’organisateur (secrétaire général de la Préfecture), le technicien et moi. Longue discussion de laquelle ressort une solution : personne sur scène, tout à la voix sans micro, on crée un couloir dans lequel je vais me déplacer allant à la rencontre de ceux qui souhaitent parler, sur les longueurs se faisant face on place les chaises. Une cinquantaine de chaque côté, le premier rang étant réservé aux invités. Résultat : le jour J cette configuration a parfaitement joué son rôle. L’absence de micro a contraint les personnes à faire l’effort de se taire pour s’écouter. La proximité des uns avec les autres et le face à face les ont obligés à se parler respectueusement. Placé au centre dans le couloir j’ai pu facilement joué mon rôle. Voilà l’animation d’un débat réussie. .
Un débat est certes à assimiler à une séance de travail mais comme il y a un public c’est en plus un événement qui répond à quelques règles de mise en scène. Les échanges peuvent avoir un contenu intéressant si dans la forme ils ne sont pas agréables et directement compréhensibles alors l’initiative est en partie ratée. Durant toute la durée de la manifestation l’animateur a deux missions : garder toujours à l’esprit la direction fixée par l’organisateur et faire en sorte que la séquence ne soit jamais ennuyeuse. C’est ici que l’association des termes animateur-journaliste prend tout son sens. Le fond est du ressort du journaliste, la manière appartient à l’animateur. Au titre donc de celui qui est en charge de l’animation il ne doit jamais perdre de vue la salle. Toujours un oeil sur le public pour noter ses réactions et faire réagir les intervenants en conséquence. Des moues dubitatives : on demande à celui qui parle des précisions. Des regards qui se perdent : on comprend qu’il faut une intervention de relance. La salle est mon tableau de bord. Autre élément constitutif de cette mise en scène des échanges celui du respect du temps. Il en va de la répartition des prises de parole qui ne se mesurent pas seulement en minutes mais aussi en terme d’impact sur le public. Un bon orateur peut être dispensé de parler longtemps alors qu’un invité plus timide aura besoin d’un créneaux plus important. Il en va encore de la durée totale du débat. Elle a été préalablement définie par l’organisateur pour de bonnes raisons (traiteur à venir, protocole d’inauguration à suivre…). C’est du devoir de celui qui mène le débat de s’y tenir au plus près. Enfin, dernier point, l’animateur est le garant de la courtoisie. Un débat respectueux est évidemment plus audible par la salle qu’une cacophonie. Il est donc plus efficace.
Les enfants sont un public très difficile à appréhender. Dans l’élaboration de l’animation d’un débat où tout doit être envisagé ils constituent toujours une source d’incertitude. Vont-ils être attentifs? Comment vont ils réagir? Telles sont les questions. En 2006, le Centre d’astronomie de Saint Michel l’Observatoire, sous l’égide du Conseil Général 04, me demande d’intervenir comme animateur-journaliste dans un débat qui rassemble scolaires et chercheurs. La proposition est sympathique. J’accepte. But de la manoeuvre : à l’heure des satellites faire comprendre aux plus jeunes la nécessité de poursuivre l’observation de l’espace depuis la terre. Le « Sidérostat » sorte de télescope pouvant accueillir du public est désigné comme lieu de la rencontre. Après quelques minutes de conférence je constate vite l’échec de la formule. Sur les bancs les enfants discutent. Le brouhaha prend l’ascendant sur les propos de mes invités. L’inconfort pour tous va finir par s’installer. J’anticipe en prenant place avec mon micro au milieu de l’assistance. Je m’assois à même le sol près des élèves et je prend l’initiative de leur donner la parole. Ils vont poser leur questions. De ce moment tout a radicalement changé. Les deux scientifiques conviés à cette rencontre se sont sentis bien plus à l’aise car considérés et surtout les enfants ont enfin trouvé de l’intérêt à cette initiative. Le public dicte toujours ses règles.
Que le thème choisi pour le débat est un lien direct ou pas avec l’actualité, il est nécessaire pour l’animateur de se tenir correctement informé de ce qui se passe à travers le monde. Cela participe à la culture générale demandée pour prétendre animer ce type d’événement. De façon permanente il doit faire l’effort de lire les journaux, d’écouter la radio ou de regarder les journaux télévisés non seulement pour connaître les faits mais aussi pour s’imprégner des analyses qui en sont faites. L’actualité détermine l’ambiance générale dans lequel se tiendra l’animation du débat. Même si les problématiques qu’il soulève nous pas de relation directe avec l’information, une question ou une explication peut à tout moment faire référence à celle-ci et l’animateur doit pouvoir comprendre voir rebondir sur le point évoqué. Cette réactivité est essentielle : elle rend plus dynamiques les échanges et ajoute une plus value à son travail. L’animateur semble plus crédible et gagne en légitimité pour arbitrer les discussions.
De 1995 à 2002 je collabore avec la Maison Régionale de l’élevage en Provence Alpes Côte d’Azur. Je suis appelé à animer plusieurs débats dont la plupart sont destinés à assurer la promotion des produits issus de l’agriculture locale. Les thèmes sont toujours simples comme « les qualités de l’agneau de Sisteron », ou « La renommée du fromage de chèvre de Banon », et le ton que ces rassemblements prennent est plutôt bon enfant avec toujours pour conclusion une séance de dégustation proposée par les agriculteurs. Dans l’agenda établi vient alors au programme une réunion sur les pieds et paquets toujours dans cette idée de faire, au bout du compte, de la publicité pour la production de chez nous. Les discussions portent sur les différentes préparations culinaires quand soudain fait irruption dans le débat la fameuse maladie dite de la vache folle par l’intermédiaire d’une question. Fort heureusement, à ce moment là, mes lectures de journaux m’avaient appris que le prion (agent pathogène) de ce mal se « logeait » principalement dans les abats (cervelle, foie,…) et qu’il y avait donc un soupçon de risque à les consommer. En deux temps trois mouvements je rebondis en faisant appeler le responsable des services vétérinaires de La Maison de l’élevage dont le bureau n’était pas très loin de notre salle de conférence afin de répondre au mieux à ces interrogations. Mes connaissances et ma réaction furent ensuite saluées lors de la fameuse dégustation qui ponctuait la matinée. De l’animation du débat les gens n’avaient pratiquement retenu que ça!
Pour en savoir un peu plus sur ce sujet concernant l’animation de débat, je vous invite à consulter ma page animateur de débat
Si vous souhaitez apprécier la manière dont j’anime un débat il vous suffit de jeter un oeil à ma chaîne youtube
[bunch_footer menu= »%5B%7B%22title%22%3A%22CONTACT%22%2C%22link%22%3A%22https%3A%2F%2Fwww.sebastien-galaup.com%2Fcontact%2F%22%7D%5D » image= »3486″ class= »Sébastien GALAUP Animateur professionnel » text= »Sébastien GALAUP, animateur professionnel. 1, rue Segond, 04510 MALLEMOISSON. N°SIRET : 429 372 717 00042″]